Shaky Shivers (2022) – Triste époque

Sung Kang s’est fait connaître en jouant l’un des personnages récurrents de la franchise Fast and Furious. Shaky Shivers, en ce qui le concerne, lui offre l’occasion de s’essayer à la réalisation. Pour son baptême de l’air, le bonhomme ne prend toutefois pas de risque en s’octroyant un budget qui n’a rien à voir avec ceux dont il dispose habituellement. En effet, Shaky Shivers se révèle bien plus intimiste avec un périmètre d’action réduit et seulement une poignée de protagonistes, dont Sung Kang lui-même, puisqu’il s’acquitte d’une apparition furtive, histoire, probablement, de garantir une plus grande visibilité à son bébé. Mais, surtout, Sung Kang choisit d’ancrer son premier long métrage dans le genre qui lui a le mieux réussi jusqu’alors, la comédie, ici teintée d’un soupçon d’horreur avec des loups-garous, une sorcière, des zombies, et même un Bigfoot…

Reste qu’on se demande encore pourquoi Sung Kang s’est senti obligé de situer l’action de son film en 1993. Surtout que les personnalités des deux héroïnes de l’histoire correspondent plutôt à celles de personnages bien ancrés dans l’époque actuelle, et certainement pas celles issues d’une année qui a produit des films dont les héros avaient des codes moraux et éthiques autrement plus intéressants, tels Un Jour sans fin, L’Étrange Noël de Monsieur Jack, La Leçon de piano, Un monde parfait… En particulier, on reste sans voix devant le manque d’empathie dont font preuve les filles.

Ce binôme fuyant ses responsabilités est composé de Lucy et Karen, inséparables jusqu’à travailler ensemble chez un glacier où elles doivent supporter des clients acariâtres. Parmi eux, une drôle de sorcière surgit de la nuit pour quémander un peu de nourriture. Face au refus quelque peu méprisant des deux complices, la vieille dame jette un sort à Lucy. Craignant de se transformer en loup-garou, la jeune femme demande à son amie Karen de l’accompagner un soir de pleine lune dans la campagne reculée et de lui mettre une balle en argent entre les deux yeux si, à tout hasard, elle devait se transformer en monstre…

Même si Shaky Shivers ne bénéficie pas du faste d’un film hollywoodien comme Fast and Furious, il n’échappe aux clichés d’usage… Ainsi, comme Lucy est grosse, elle se doit d’être bécasse et sexy. Quoi qu’il en soit, en tête de gondole de ce duo d’actrices choc, Brooke Markham dispose effectivement d’un talent remarquable pour rendre diablement affriolant sa poignée de kilos en trop. L’actrice dira peut-être quelque chose aux personnes qui ont vu la série In the Dark (2019-2021). VyVy Nguyen, pour sa part, se voit attribuer le rôle de bout-en-train et fait le taf en faire-valoir de sa comparse.

Le duo d’amies un peu branque composé par Karen et Lucy génère toutefois le sourire par sa maladresse. En effet, à chaque nouvelle situation, les inséparables doivent choisir entre raison et chaos. Évidemment, elles optent à chaque fois pour la seconde alternative, menant ainsi l’histoire dans une situation de plus en plus inextricable, déchaînant, de la part de nos deux héroïnes, des analyses non moins cocasses.

Certes, la dynamique est bien connue, le style de jeu des actrices n’a rien d’innovant non plus, mais la succession de malentendus et autres imbroglios rythment agréablement le film. Les éléments qui permettent de relancer à chaque fois l’intrigue génèrent de nombreux rebondissements bienvenus. Le scénario s’accorde même quelques passages agréables et, globalement, l’ennui n’existe pas. La preuve en est que, très rapidement, la question n’est plus seulement de savoir si Lucy est un loup-garou puisque d’autres mythiques créatures s’apprêtent à faire leur apparition.

Pour finir de manière franchement positive, on saluera le travail de Gabriel Bartalos qui, pour sa part, est bien un véritable transfuge des années 80 et 90 où il s’était illustré en commettant les trucages de films comme La lampe (1987), Dolls : Les Poupées (1986) ou encore From Beyond : Aux portes de l’au-delà (1986). Le talentueux artisan signe ici des effets spéciaux excellents. Son zombie rappelle même affectueusement les délirantes créatures de Frère de sang 2 (1990) et de Frères de sang 3 : La Progéniture (1992)… La transformation non aboutie de Lucy en loup-garou s’avère, quant à elle, franchement jolie.