Au sommaire du numéro 37 de Sueurs Froides :
Val Lewton, Nancy Drew, Ulli Lommel, Flower and Snake, Leprechaun, Patrice Herr Sang, Marian Dora.

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Loup-garou des années 50 et 60

Le Monstre aux filles – un loup-garou ronfle dans le dortoir des filles


Italie, Autriche - 1961 - Paolo Heusch
Titres alternatifs : Werewolf in a Girl's Dormitory, Lycanthropus
Interprètes : Barbara Lass, Carl Schell, Curt Lowens, Maurice Marsac, Michela Roc, Mary McNeeran, Grace Neame

Avec Le Monstre aux filles, Paolo Heusch tente de devancer d’une bonne vingtaine d’années le cinquième opus de la saga Hurlements en proposant, lui aussi, un whoodunit dont le but du jeu consiste à découvrir qui est le loup-garou. Cette fois-ci cependant, la créature commet ses méfaits parmi les pensionnaires d’un dortoir pour gamines à la dérive… Sacré argument de vente pour un produit pourtant particulièrement poussif…

Le Dr. Olcott prend ses nouvelles fonctions dans un institut pour filles aux portes de la délinquance. Mais, dès son arrivée, des événements tragiques se déroulent dans la bâtisse. Et la découverte d’une étudiante assassinée laisse supposer qu’un animal sauvage sévit dans les bois, mais uniquement les soirs de pleine lune… Simple coïncidence ? À moins que le coupable ne soit Sir Alfred, impliqué dans un chantage douteux. Ou alors le Dr Olcott lui-même, essayant, par la même occasion, d’effacer les pistes qui mènent au sombre secret qu’il semble dissimuler ?

Le Monstre aux filles – un loup-garou ronfle dans le dortoir des filles

L’imagination va bon train avec toutes ces jeunes femmes logées sous le même toit, mais l’imagination seulement… Rappelons que nous sommes en 1961. Et que la révolution sexuelle n’existe alors que sous la forme d’un fantasme encore vague. Ainsi, les filles usent bien de leur charme pour déstabiliser leur nouveau professeur mais l’entreprise de séduction reste très sage. Au final, sur ce point, Le Monstre aux filles s’avère tout aussi décevant que Le Sadique de la treizième heure (1968). Giallo qui se déroulait également dans un dortoir pour filles, menacées cette fois-ci par un assassin ganté de noir.

Si l’on peut se résoudre à la pudibonderie dont fait preuve le film, rien en revanche ne justifie la monotonie générale. C’est peu dire que Le Monstre aux filles fait de la peine si on le confronte à des films contemporains de la trempe d’un Masque du démon (1960). Avec ses hiboux qui hululent, ses vierges effarouchées qui crient dans des parcs sombres, ses portes qui grincent, sa vieille sorcière vivant dans une maison isolée au cœur de la sombre forêt, Le Monstre aux filles s’efforce bien de prendre l’allure d’un conte gothique. Malheureusement la portée de ces tentatives esthétisantes restent grandement diminuées par un rythme toujours aussi morose.

Le Monstre aux filles – un loup-garou ronfle dans le dortoir des filles

Tristement, on constate aussi que Le Monstre aux filles aurait beaucoup à apprendre d’un autre genre qui sévissait à la même époque : Les Edgar Wallace Krimis. Comparer le casting du Monstre aux filles à celui d’un Crapaud masqué (1963) par exemple, fait ressortir le peu d’enthousiasme qu’inspire la galerie de personnages exposée par Paolo Heusch. Il faut dire que les protagonistes sont portés par des acteurs faiblement investis…

En tête, on trouve Carl Schell qui fait pourtant partie du clan Schell, une famille entièrement tournée vers l’art. Du papa écrivain Hermann Ferdinand à la maman actrice Margarethe Noé von Nordberg ou encore ses frères et sœurs : Maria, Maximilian et Immy Schell. Si le membre Carl Schell a grandi dans l’art, il n’aura guère brillé qu’au théâtre. Sa contribution pour le 7e art s’avère bien décevante et son apport au Monstre aux filles anecdotique… En tout cas, sans commune mesure avec l’excentricité dont fait preuve, dans les krimis, le personnage incarné par un Joachim Fuchsberger, par exemple.

Il en est de même pour les autres protagonistes qui manquent tous de l’étrange drôlerie qu’inspire un Eddie Arent ou du trouble que peut générer un Klaus Kinski.

Le Monstre aux filles – un loup-garou ronfle dans le dortoir des filles

Seule Barbara Lass sort du lot avec ses grands yeux hypnotiseurs. Peut-être aurait-elle pu tirer son épingle du jeu et porter le film grâce à son charisme évident. Mais, le réalisateur, routinier et conventionnel, s’en tient malheureusement à l’utiliser comme simple jolie poupée. À l’image de cette scène finale où elle sort littéralement du cadre pour laisser le héros s’accaparer tous les mérites de la résolution de l’énigme.

C’est triste à dire, mais Barbara Lass n’aura brillé au cinéma que dans le film polonais Jowita (1967) où son regard transperce carrément l’affiche. Dans le film de Janusz Morgenstern, elle fascine suffisamment le héros pour qu’il se perde à essayer de la retrouver, entre fantasme et réalité. Un sujet et un film à découvrir, manifestement. En ce qui concerne Le Monstre aux filles, c’est surtout le manque d’audace et d’innovation qui se manifestent.

Paolo Heusch filme l’action sans excentricité. Au point que son film ressemble à s’y méprendre aux Poverty Row qui fleurissaient à Hollywood… 20 ans plus tôt. Ainsi, de longues discussions, certes dans des décors superbes, s’enchaînent mais sans jamais, ou presque, faire usage de coups de théâtre pour relancer l’intérêt du spectateur.

Paolo Heusch, alias Richard Benson, a commencé sa carrière avec le générique du film de Mario Bava Le danger vient de l’espace (1958). Par la suite, on le trouve bûchant sur diverses bobines comme Une vie violente (1962) d’après Pasolini. Ceci dit, son œuvre comprend d’abord des films qui marquent par la déception qu’ils ont inspirée. Comme la biographie El ‘Che’ Guevara (1968), ou encore Il Comandante (1963), l’un des rares films dramatiques dans lequel a joué Totò, acteur emblématique du comique napolitain que l’on comparait alors à Buster Keaton et Charlie Chaplin.

Le Monstre aux filles – un loup-garou ronfle dans le dortoir des filles

Responsable du scénario, Ernesto Gastaldi livre pourtant un sujet intéressant. Lui qui, plus tard, écrira avec Sergio Leone Mon nom est Personne (1973) et imaginera des gialli aussi fameux que Les Rendez-vous de Satan (1972), Toutes les couleurs du vice (1972), La Queue du scorpion (1971), L’Étrange Vice de Madame Wardh (1971), Photo interdite d’une bourgeoise (1970), etc. Etc.

Ce n’est donc probablement pas un hasard si c’est dans le scénario que l’on trouve l’élément le plus remarquable du film, au moment de révéler le nom du coupable. Dans la tradition du film de loup-garou, celui-ci subit son état de monstre et ce statut de victime donne lieu à des leçons sur le bien et le mal. Présentement, le pauvre bougre avoue qu’il soit subir des soins en cachette, dans la crypte.

Notre loup-garou revêt d’ailleurs une apparence plutôt saugrenue avec des dents vraiment particulièrement longues ! Un comble pour un canidé, de faire penser à un gros chat ! Ceci dit, la créature s’apparente principalement à un être laid grognant comme une bête malfamée. Et en terme de terreur pure, sa crédibilité en prend même un coup en se voyant défait par un simple berger allemand.


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Article signé André Quintaine
Avec L'Écran Méchant Loup, je vous propose de vous plonger
dans la filmographie des films de loups-garous.
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